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Abus de confiance : comment le reconnaître et le combattre ?
Chloé Tavares de Pinho
Diplômée de l’INSEEC et de l’Université de Reims en droit des affaires.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.
L'abus de confiance, lorsqu'il touche une entreprise ou une association, constitue une violation grave de la confiance accordée à un individu par ses pairs ou par les membres de l'organisation. Ce phénomène peut engendrer des préjudices financiers considérables et fragiliser durablement la structure concernée.
Qu’est-ce que l’abus de confiance ? Quels sont les éléments constitutifs d'un abus de confiance ? Quels sont les recours en cas d’abus de confiance ? Quelles sanctions en cas d’abus de confiance en entreprise ou en association ?
Mini-Sommaire
Qu’est-ce qu’un abus de confiance ?
Un abus de confiance en entreprise ou en association loi 1901 se produit lorsqu'une personne utilise ou s'approprie un bien qui lui a été confié de manière volontaire, mais de façon contraire à l'usage prévu initialement. Ce bien peut inclure :
- des sommes d'argent ;
- des marchandises ;
- des chèques ;
- ou des fichiers de données comme un fichier clients.
L'abus de confiance, par définition dans le code pénal, est le fait de détourner, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou tout autre bien qui ont été remis à une personne avec l'obligation de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé.
🛠️ En pratique : un exemple d'abus de confiance en entreprise peut être un employé chargé de vendre une voiture de société qui garde pour lui-même l'argent de la vente. Dans le cadre d'une association, cela pourrait être un membre qui utilise les fonds collectés pour un projet associatif à des fins personnelles.
Contrairement à l'escroquerie, l'abus de confiance nécessite qu'il y ait eu un accord préalable entre les parties, qu'il soit écrit ou oral, comme un contrat de travail ou un mandat. L'infraction est caractérisée par la violation de cet accord par le détournement des biens confiés.
Quels sont les éléments constitutifs d'un abus de confiance ?
L'abus de confiance se caractérise par trois éléments constitutifs :
- le détournement ;
- le préjudice ;
- et l’intention.
Le détournement
Le détournement consiste à utiliser un bien ou une somme d'argent qui a été confié à une personne, à une autre fin que celle qui avait été convenue.
📌 À retenir : il est nécessaire de prouver que le bien ou l'argent a été utilisé pour un autre usage que celui prévu initialement. Cela peut se faire par exemple au moyen de factures, de relevés bancaires ou de témoignages.
Dans le cadre d'une entreprise ou d'une association, le détournement peut porter sur :
- des fonds sociaux ;
- des marchandises ;
- des matériels ;
- ou encore des informations confidentielles.
Le préjudice
Le préjudice est la perte subie par la victime de l'abus de confiance. Il peut être matériel (perte d'argent, de biens) ou moral (préjudice d'image, atteinte à la réputation).
⚠️ Attention : c'est à la victime de prouver qu'elle a subi un préjudice du fait du détournement.
Le préjudice subi par une entreprise ou une association peut être :
- d'ordre financier (perte de chiffre d'affaires, de subventions);
- mais aussi d'ordre moral (atteinte à la réputation, perte de confiance des membres ou des partenaires).
L'intention
L'intention de nuire est la volonté de la part de l'auteur de l'abus de confiance de porter préjudice à la victime. Il ne s'agit pas nécessairement d'une intention de s'enrichir personnellement, mais il peut également être motivé par la vengeance, la jalousie ou la volonté de nuire à l'entreprise ou à l'association.
L'intention est difficile à prouver, car il s'agit d'un élément subjectif. On peut néanmoins la déduire de certains indices, tels que les agissements antérieurs de l'auteur, ses motivations ou les bénéfices qu'il a tirés de son acte.
L'intention de nuire dans le cadre d'une entreprise ou d'une association peut être motivée par la volonté de :
- s'approprier des fonds pour des besoins personnels ;
- d'éliminer un concurrent ;
- de discréditer un dirigeant ;
- ou de saboter un projet.
Pour qu'il y ait abus de confiance, il est nécessaire que les trois éléments constitutifs soient réunis : le détournement, le préjudice et l'intention.
Que faire en cas de constat d’un abus de confiance ?
En cas de constat d’un abus de confiance, il faut :
- rassembler des preuves ;
- porter plainte ;
- et se constituer partie civile.
Rassembler les preuves
Avant de porter plainte, il est important de rassembler le maximum de preuves possibles pour étayer une accusation d'abus de confiance. Cela peut inclure :
- des documents (relevés bancaires, factures, contrats, emails, courriers, etc.) ;
- des témoignages de personnes qui ont été témoins de détournement de biens ou qui peuvent confirmer les propos ;
- ou des expertises si le préjudice est d'ordre matériel, il peut être utile de faire réaliser une expertise pour en évaluer le montant.
Porter plainte
Il y a deux possibilités pour porter plainte :
- auprès de la police ou de la gendarmerie ;
- auprès du procureur de la République.
Auprès de la police ou de la gendarmerie
La victime peut se rendre dans un commissariat de police ou une brigade de gendarmerie. Les policiers ou les gendarmes ont l'obligation d'enregistrer la plainte. Celle-ci doit être signée sur place.
Auprès du procureur de la République
La victime peut aussi envoyer un courrier au tribunal judiciaire du lieu de l'infraction ou du domicile de l'auteur de l'infraction.
Le courrier doit comporter un certain nombre d'informations, notamment :
- l’état civil et les coordonnées complètes de la victime ;
- un récit détaillé des faits ;
- le nom de l'auteur supposé ;
- la description et l'estimation du préjudice ;
- et les pièces justificatives
La plainte peut être envoyée en lettre recommandée avec accusé de réception, par lettre simple ou par lettre suivie. Elle peut être aussi déposée directement à l'accueil du tribunal.
📌 À retenir : la victime a 6 ans à partir de la découverte des faits pour porter plainte.
Se constituer partie civile
En portant plainte, la victime a la possibilité de se constituer partie civile. Cela signifie qu’elle demande au juge de condamner l'auteur des faits à réparer le préjudice subi.
Pour se constituer partie civile, elle doit en faire la demande lors du dépôt de plainte ou au cours de la procédure. Ainsi, elle peut demander la réparation de :
- le montant du bien ou de l'argent détourné ;
- les dommages et intérêts pour la privation de l'objet et le préjudice moral ;
- les frais engagés pour le procès.
⚠️ Attention : les demandes doivent être chiffrées.
Autres démarches
En plus de porter plainte et de se constituer partie civile, la victime d’abus de confiance peut également :
- mettre fin à une procuration si l'auteur des faits en possède une ;
- et faire opposition aux virements au profit de l'auteur des faits.
Quels recours en cas d’abus de confiance ?
En cas d'abus de confiance, la victime dispose de plusieurs recours :
- recours pénaux ;
- recours civils ;
- autres recours.
Recours pénaux
Comme nous l’avons vu précédemment, la victime peut porter plainte auprès de la police ou de la gendarmerie ou directement auprès du procureur de la République. La plainte doit être déposée dans un délai de 6 ans après la découverte des faits.
Le juge pénal peut condamner l'auteur de l'abus de confiance à rembourser à la victime le montant du bien ou de l'argent détourné, ainsi que les dommages et intérêts pour le préjudice subi.
Recours civils
La victime peut intenter une action en restitution devant le tribunal civil pour récupérer le bien qui lui a été détourné.
Si le bien ne peut pas être restitué, la victime peut demander au juge civil de la condamner à lui verser des dommages et intérêts.
Autres recours
Si l'auteur des faits dispose d'une procuration sur vos comptes, vous pouvez mettre fin à cette procuration.
Vous pouvez demander à votre banque de faire opposition aux virements au profit de l'auteur des faits.
📝 À noter : en plus des recours susmentionnés, il est également important de signaler l'abus de confiance à la police ou à la gendarmerie. Cela permettra aux forces de l'ordre de mener une enquête et de poursuivre l'auteur des faits.
Quelles sanctions en cas d’abus de confiance ?
Les sanctions encourues en cas d'abus de confiance varient en fonction de la situation de la victime et des circonstances de l'infraction. Généralement, elles sont de :
- 5 ans de prison et 375.000 € d'amende ;
- 10 ans de prison et 1.500.000 € d'amende lorsque l'auteur des faits est un professionnel tel qu'un notaire, un commissaire de justice, un huissier de justice, un commissaire-priseur judiciaire, etc.
Si l’auteur des faits est un dirigeant d'entreprise, un banquier, etc. La sanction encourue est de 7 ans de prison et 750.000 € d'amende.
Dans le cas d’un abus de confiance commis au préjudice d'une association sociale ou humanitaire, les sanctions peuvent être de :
- 5 ans de prison et 375.000 € d'amende ;
- ou 7 ans de prison et 750.000 € d'amende si trois conditions sont réunies (la victime est une association humanitaire ou sociale, l'auteur des faits a fait appel au public pour collecter des fonds, et l'auteur des faits s'est approprié les fonds collectés).
📌 À retenir : dans tous les cas, le complice d'un abus de confiance risque la même peine que l'auteur.
FAQ
Quelle est la différence entre abus de faiblesse et abus de confiance ?
L’abus de confiance est le détournement d'un bien ou d'une somme d'argent confié à une personne, avec intention de nuire dès le départ. L’abus de faiblesse, lui, est le fait de profiter d'une personne en état de faiblesse pour lui soutirer un bien ou une somme d'argent, sans que ce bien lui ait été confié au préalable.
Quel délai de prescription pour un abus de confiance ?
Le délai de prescription est de 6 ans à compter de la découverte des faits par la victime. Il y a deux exceptions :
- le délai passe à 12 ans maximum après les faits en cas de découverte tardive ;
- et la prescription imprescriptible pour certains crimes graves, comme les violences sur mineurs.
Principales sources législatives et réglementaires :
- articles 314-1 à 314-4 - Code pénal ;
- article 15-3 - Code de procédure pénale ;
- article 8 - Code de procédure pénale.
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Chloé Tavares de Pinho
Diplômée de l’INSEEC et de l’Université de Reims en droit des affaires.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.Fiche mise à jour le
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