
Qu’est-ce que le licenciement pour faute lourde ?
Cécile Grasset
Vous considérez qu’un de vos salariés a commis une faute lourde dans l’exercice de ses fonctions et vous envisagez de le licencier ? Le licenciement pour faute lourde est une forme de rupture du contrat de travail qui entraîne des conséquences importantes, et qui nécessite une procédure spécifique.
Comment savoir s’il s’agit bien d’une faute lourde ? Quelles sont les étapes à respecter ? Des indemnités doivent-elles être versées ? Legalstart fait le point sur la définition du licenciement pour faute lourde, la procédure à suivre et les conséquences sur les droits du salarié.
Qu’est-ce qu’une faute lourde ?
Faute lourde : définition
La faute lourde est une faute d’une gravité particulière, commise avec l’intention de nuire. Lorsqu’elle est faite par un salarié dans le cadre de son travail, elle est caractérisée par :
- l’importance de la violation ;
- sa volonté de porter préjudice à son employeur ou à l’entreprise.
📝 À noter : la faute lourde peut résulter d'un cumul de fautes graves.
Faute lourde : exemples
La jurisprudence offre de nombreux exemples de fautes lourdes commises par des employés et sanctionnées en tant que telles. Ainsi, la faute lourde est avérée, notamment, dans les cas suivants :
- entrave à la liberté du travail : lorsqu’un salarié gréviste bloque l'accès à l’entreprise, de façon à empêcher les employés non-grévistes de travailler ;
- menace, violence, ou agression (physique ou verbale) envers l’employeur ou les autres salariés ;
- séquestration ;
- détournement de clientèle en faveur d'un concurrent ;
- acte discriminatoire ;
- dégradation de matériel ou d’outil appartenant à l’entreprise ;
- révélation à des tiers d’informations confidentielles.
Quelle est la différence entre faute grave et faute lourde ?
La gravité de la faute de votre salarié doit être étudiée de façon précise, en fonction des circonstances. Si la qualification de faute grave ou lourde peut sembler difficile à établir, il existe toutefois une différence notable entre les deux. Il s’agit de la volonté du salarié. En effet, contrairement à la faute lourde, dans laquelle votre employé cherche à vous léser, la faute grave n’est pas commise dans cette intention.
Néanmoins, la faute grave est d’une telle importance qu’elle rend impossible le maintien de votre salarié dans l'entreprise.
Quelles conséquences en cas de faute lourde ?
Les conséquences d’une faute lourde du salarié
Lorsqu’un salarié commet une faute qualifiée de lourde, il encourt des sanctions importantes. En effet, la faute lourde est un motif de licenciement disciplinaire qui peut entraîner la rupture de son contrat de travail, sans indemnité ni préavis.
En tant qu’employeur, vous pouvez également suspendre le contrat de travail de votre salarié fautif en lui notifiant sa mise à pied conservatoire, en attendant la sanction disciplinaire.
📝 À noter : le salarié mis à pied ne perçoit aucune rémunération pendant cette période. Toutefois, si la procédure n’aboutit pas à un licenciement pour faute lourde, le salarié sera payé rétroactivement des salaires correspondant à la période de mise à pied.
Par ailleurs, si les agissements du salarié ont entraîné un préjudice ou des pertes pour l'entreprise, il peut se voir contraint de les réparer au moyen de dommages-intérêts.
☝️ Bon à savoir : les faits définissant la faute lourde peuvent engager la responsabilité pénale de votre employé. S’il commet une infraction dans le cadre de son activité professionnelle, il sera donc passible d’une condamnation pénale.
Les conséquences d’une faute lourde de l’employeur
De la même manière que le salarié, l’employeur qui manque à ses obligations engage sa responsabilité. Ainsi, face à des manquements graves de son employeur, un salarié peut soit engager une action en résiliation judiciaire de son contrat de travail, soit prendre acte de la rupture du contrat aux torts du dirigeant.
Dans le premier cas, le contrat de travail ne prend fin que lorsque le conseil des prud’hommes en prononce la résiliation. Dans le cas de la prise d’acte de rupture du contrat de travail, le contrat cesse immédiatement, sans préavis. Néanmoins, la rupture doit être validée a posteriori par les juges.
La résiliation judiciaire et la prise d’acte produisent les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvrent droit à des indemnités pour le salarié.
📝 À noter : il n’y a pas de distinction entre faute simple, grave ou lourde. Le manquement de l'employeur doit toutefois être suffisamment grave pour empêcher la poursuite de la relation de travail.
Parmi les violations sanctionnées, on peut citer :
- le défaut de paiement du salaire ;
- le manquement aux obligations de sécurité, pouvant entraîner un accident de travail ou une maladie professionnelle ;
- la discrimination ;
- le harcèlement moral ou sexuel.
Quelle procédure pour un licenciement pour faute lourde ?
Le licenciement pour faute lourde est dit disciplinaire. Il a pour but de sanctionner le ou les comportements fautifs du salarié. L’employeur doit suivre scrupuleusement la procédure de licenciement pour motif personnel qui comporte quatre étapes : la convocation, l’entretien, la notification et la fin du contrat.
La convocation du salarié
L'employeur convoque le salarié à un entretien préalable, par lettre recommandée avec accusé de réception ou en lui remettant en main propre contre un reçu signé. La convocation doit spécifier le but de l'entrevue, sa date, son heure et le lieu. Elle doit, en outre, informer le salarié qu’il a la possibilité de se faire accompagner par un autre employé, un représentant du personnel ou un conseiller extérieur à l’entreprise.
La tenue de l’entretien préalable
Cette étape, obligatoire avant toute décision, doit se dérouler au plus tôt 5 jours ouvrables après la présentation de la lettre de convocation.
L’entretien a pour but de présenter au salarié les motifs du licenciement envisagé et de l’informer de ses droits et obligations. L’employeur doit être en mesure de prouver les faits et la volonté de nuire, sans quoi la faute lourde ne peut pas être retenue.
📝 À noter : l’absence du salarié à l'entretien préalable n’entraîne aucune conséquence sur la suite de la procédure.
La notification du licenciement
À l’issue de l’entretien, l'employeur qui choisit de poursuivre le licenciement doit notifier sa décision au salarié par lettre recommandée avec avis de réception. Un délai de 2 jours ouvrables minimum et d’1 mois maximum après l'entretien doit être respecté.
La notification doit rappeler les raisons du licenciement et fournir des détails sur les faits reprochés au salarié. Ils peuvent également être précisés, à l'initiative de l’employeur ou sur demande du salarié, dans les 15 jours qui suivent la notification.
La rupture du contrat de travail
Le contrat de travail prend fin dès la première présentation de la lettre de licenciement, sans période de préavis.
Licenciement pour faute lourde : quelles indemnités ?
En tant qu’employeur, vous n’êtes pas redevable envers votre salarié de l’indemnité légale de licenciement, si celui-ci est licencié pour faute lourde. En effet, cette indemnité est destinée à dédommager le salarié en contrat à durée indéterminée (CDI) qui :
- a acquis 8 mois d’ancienneté dans l’entreprise ;
- perd son travail pour un motif autre qu’une faute grave ou lourde.
En outre, son contrat de travail étant rompu avec effet immédiat, le salarié remercié est dispensé d’effectuer son préavis. Il est donc privé, par sa faute lourde, de l’indemnité compensatrice de préavis.
Néanmoins, le salarié bénéficie :
- d’une indemnité compensatrice de congés payés ;
- de la contrepartie financière prévue dans sa clause de non-concurrence, le cas échéant.
Licenciement pour faute lourde : quel droit au chômage ?
Tout salarié licencié peut percevoir l’allocation d'aide au retour à l'emploi (ARE) versée par l’assurance-chômage, s'il remplit les conditions lui permettant d'en bénéficier. En effet, Pôle emploi considère qu’un licenciement, quel qu’en soit le motif, prive involontairement le salarié de son emploi. À l’inverse de la démission, laquelle est considérée comme une rupture volontaire du contrat de travail (sauf exceptions), le licenciement pour faute lourde et le chômage sont donc compatibles.
Ainsi, si vous licenciez un de vos salariés pour faute lourde, son droit au chômage sera ouvert s’il remplit les conditions suivantes :
- il réside en France ;
- il ne remplit pas les conditions d’obtention de la retraite à taux plein ;
- il est apte physiquement à exercer un emploi ;
- il s’inscrit à Pôle emploi en qualité de demandeur d’emploi ;
- il recherche activement un travail ;
- il justifie d’une durée minimale d’affiliation de 6 mois, au cours des 24 derniers mois s’il a moins de 53 ans, ou au cours des 36 derniers mois s’il a 53 ans et plus.
FAQ
Quelles sont les différentes fautes ?
Les différentes fautes imputables à un salarié sont classées par ordre de gravité :
- la faute simple : elle constitue une inexécution fautive de son contrat de travail ;
- la faute grave : elle rend impossible son maintien dans l’entreprise ;
- la faute lourde qui traduit une inexécution volontaire de son ou ses obligations, dans le but de nuire à son employeur ou à l’entreprise.
Quelle faute ne donne pas droit au chômage ?
Quelle que soit la faute commise par votre salarié, son licenciement est considéré par l’assurance-chômage comme une perte involontaire de son emploi. Tout licenciement pour faute donne donc droit à l'allocation d'aide au retour à l'emploi.
Abandon de poste : licenciement pour faute lourde ou grave ?
Jusqu’alors, lorsqu’un salarié quittait son poste de travail sans autorisation et sans motif légitime, il pouvait faire l’objet d’une procédure de licenciement pour faute grave. Une loi du 21 décembre 2022 prévoit désormais qu’un salarié ayant abandonné volontairement son poste et ne l’ayant pas repris malgré une mise en demeure, est présumé être démissionnaire. L’abandon de poste est ainsi exclu du régime d’assurance-chômage.
Principales sources législatives et réglementaires
- articles L1232-1 à L1232-14 - Code du travail
- article L2511-1 - Code du travail
- article L1234-9 - Code du travail
Cécile Grasset
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