
Peut-on créer une association à but lucratif ?
Maître Alexis Aronio de Romblay
Avocat au barreau de Paris associé chez Lampidès & Potier.
Vous êtes très nombreux à vous interroger sur la possibilité de créer une association à but lucratif, c'est-à-dire de dégager et distribuer les bénéfices résultant de l'activité de l'association.
Est-ce possible ? Quelle est la différence entre une association à but lucratif et une association à activité lucrative ? Comment déterminer si une association exerce une activité lucrative ? Enfin, quelles en sont les conséquences fiscales et comptables ? On répond à toutes ces questions pour que vous y voyez plus clair !
Quelle est la différence entre une association à but lucratif et une association à activité lucrative ?
Une association à but lucratif n’existe pas !
Une association est nécessairement sans but lucratif. Ainsi, et malgré une idée répandue, l’association à but lucratif n’existe pas !
La loi de 1901 impose qu’une association dispose d’un « but autre que de partager des bénéfices ». Concrètement, cela signifie que l’objet, direct ou indirect, d’une association, ne peut pas être le partage des revenus générés par l’association entre les fondateurs.
Bon à savoir : si vous souhaitez créer une structure vous permettant de gagner de l’argent et de toucher des bénéfices, vous devez créer une entreprise. Cette différence vous permet de choisir entre association et entreprise.
Une association peut-elle avoir une activité économique ?
S’il est interdit de partager les bénéfices réalisés entre les fondateurs de l’association, il est tout à fait possible, pour une association, d’avoir des activités lucratives.
En effet, si l'association à but lucratif n'existe pas juridiquement, il est en revanche possible qu’une association ait des activités économiques.
En revanche, ces activités doivent obligatoirement permettre de développer l’objet non-lucratif de l’association. Par exemple :
- L’organisation de spectacles payants par une association culturelle ;
- La vente de boissons lors d’une soirée étudiante (sous réserve de se limiter aux boissons de licence 2 et d'avoir une autorisation municipale) ;
- La vente de produits dérivés (vêtements, nourriture).
Attention : L’exercice habituel de ce type d'activités devra alors être expressément prévu par les statuts de l'association. Pour cela, il faut insérer dans les statuts de l’association une clause stipulant que l’association exerce ces activités lucratives afin de favoriser la réalisation de son objet social.
Activités lucratives des associations : quelle imposition ?
L’exercice par une association d’une activité économique emporte des conséquences fiscales et comptables :
- L’association exerçant une activité lucrative est assujettie aux impôts commerciaux : l’impôt sur les sociétés et la TVA ;
- L’association est soumise à certaines règles comptables.
Toutefois, dans le cadre de ses activités lucratives, l’association peut, sous certaines conditions, bénéficier d’un régime fiscal favorable.
Attention : il ne faut pas confondre une activité lucrative avec un don ou encore un moyen de financement des associations.
Comment déterminer si une association exerce une activité lucrative ?
Étape 1 : La gestion de l’association est-elle désintéressée ?
Dès la création d'une association, il est nécessaire d'analyser la gestion de l’association pour déterminer si elle exerce une activité lucrative. En effet, l'essentiel est de savoir si la gestion de l’association est désintéressée ou non.
La gestion de l'association va être considérée comme désintéressée si l'activité des dirigeants (président, membre du conseil d'administration ou du bureau) est exercée à titre bénévole. En outre, l'association ne doit procéder à aucune distribution directe ou indirecte de bénéfices, sous quelque forme que ce soit et les membres ne peuvent pas, en principe, être déclarés bénéficiaires d'une partie de l'actif de l'association.
Toutefois, le fait que certains dirigeants de l'association soient rémunérés ne remet pas nécessairement en cause le caractère désintéressé de la gestion de l'association si elle rentre dans l’une des situations suivantes :
Situations |
Précisions |
Si la rémunération brute mensuelle versée à chaque dirigeant n'excède pas les ¾ du SMIC. |
Pour le calcul de la rémunération, sont pris en compte :
|
Si la rémunération des dirigeants est supérieure au plafond des ¾ du SMIC et que la gestion est transparente |
Pour qu’une gestion une transparence soit mise en place, la gestion de l'association est alors soumis au respect de plusieurs principes :
Bon à savoir : les membres concernés ne participent pas à cette délibération.
Attention, l'emploi de salariés peut remettre en cause le caractère désintéressé de la gestion de l'association si :
|
Si le nombre de dirigeants susceptibles de percevoir une rémunération (supérieure ou égale au ¾ du SMIC) ne dépasse pas un certain plafond. |
Le calcul du plafond dépendant des ressources de l'organisme, au cours des trois exercices clos précédant celui au cours duquel la rémunération est versée. Il convient alors de prendre en compte que :
Bon à savoir : les ressources provenant d'organismes publics, telles que les subventions, ne sont pas prises en compte.
|
Pour conclure, si le caractère intéressé de la gestion de l'association est confirmé alors l’administration fiscale estimera que l'association a une activité lucrative.
En revanche, si la gestion de l'association est désintéressée, il conviendra d'analyser le second critère et d'examiner la situation de l'association par rapport à la concurrence.
Étape 2 : Quelle est la situation de l'association au regard de la concurrence ?
Si la gestion de l'association est désintéressée, l'activité de l'association ne peut être qualifiée de lucrative que si elle concurrence des entreprises commerciales.
La question est alors de savoir si le consommateur peut, pour un besoin (bien ou service) donné, s'adresser indifféremment à l'association ou à une entreprise commerciale :
- Si l'activité de l'association ne concurrence aucune entreprise, l'activité de l'association n'est pas qualifiée de lucrative ;
- Si l'association concurrence une ou plusieurs entreprises, il conviendra d'examiner si l'activité de l'association est exercée dans des conditions similaires à celles des entreprises du secteur lucratif.
Etape 3 : Quelles sont les conditions d'exercice de l'activité de l'association ?
Si l'association exerce une activité concurrente de celle d'entreprises du secteur lucratif, elle pourra, en fonction des conditions de l'exercice de son activité, être considérée comme n'exerçant pas une activité lucrative. Il s'agira alors d'apprécier les critères des "4 P", à savoir par ordre d'importance décroissante le produit, le public, le prix, et la publicité.
Une association va pouvoir échapper à la qualification d'activité lucrative si :
- Produit : les produits ou services fournis par l'association visent à satisfaire un besoin qui n’est pas pris en compte par le marché (ou dans des conditions peu satisfaisantes) ;
- Public : les biens ou services proposés par l'association sont fournis à des personnes se trouvant dans une situation économique et sociale difficile (par exemple personnes handicapées ou au chômage). Dans ce cas, il sera considéré que l'activité de l'association a une utilité sociale ;
- Prix : le prix des biens ou services proposés par l'association est inférieur à celui proposé par des entreprises pour les mêmes biens ou services, ou bien adapté à la situation des bénéficiaires (par exemple, réduction pour les chômeurs) ;
- Publicité : si par principe, le recours à des méthodes commerciales ou des méthodes de publicité traditionnelles constitue un indice de lucrativité, il est possible à l'association de procéder à des opérations de communication pour, notamment, faire appel à la générosité du public.
Quelles sont les conséquences fiscales et comptables d’une association à activité lucrative ?
Conséquences fiscales : l’assujettissement aux impôts commerciaux
Sur le plan fiscal, le caractère lucratif de l'activité de l'association va entraîner l'assujettissement de l'association aux impôts commerciaux : impôt sur les sociétés (IS), taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et contribution économique territoriale (CET).
Il existe, toutefois, des exceptions :
- Si les activités lucratives restent accessoires. En effet, si la gestion de l'association est désintéressée et si les activités non lucratives de l'association demeurent "significativement prépondérantes", les activités lucratives réputées accessoires ne seront pas soumises aux impôts commerciaux si le chiffre d'affaires pour une année civile donnée n'excède pas le seuil de 72.432€ HT.
- S’il s’agit d’un événement associatif de bienfaisance ou de soutien organisé au profit exclusif de l’association. En effet, dans la limite de 6 manifestations par an, ces évènements sont exonérés de la TVA.
- Si les activités lucratives sont réalisées au bénéfice des membres de l’association. En effet, certaines activités proposées aux membres de l’association pourront être exonérées de TVA. Ainsi, peuvent être exonérés de TVA les ventes de biens (dans la limite de 10% du chiffre d'affaires) et les services à caractère social, éducatif, culturel ou sportif. En revanche, sont exclues les opérations d’hébergement, de restauration et d’exploitation des bars et des buvettes.
Si votre association répond à plusieurs de ces critères, elle pourra bénéficier cumulativement de ces régimes fiscaux avantageux.
Conséquences comptables : déclaration du montant des ressources et certification des comptes
En outre, l'association qui décide de rémunérer ses dirigeants devra communiquer chaque année aux services fiscaux concernés une déclaration attestant du montant de ses ressources et indiquant l'identité et le montant de la rémunération de chaque dirigeant concerné.
Sur le plan comptable, les associations considérées comme ayant une activité lucrative doivent respecter certaines obligations. Les associations peuvent vendre des produits, mais elles doivent tenir une comptabilité d'association et préparer les comptes annuels comprenant un bilan, un compte de résultat et une annexe, et faire certifier leurs comptes par un commissaire aux comptes. L'association devra, par la suite, publier ses comptes annuels et le rapport du commissaire aux comptes sur le site internet de la direction des journaux officiels, et ce dans les trois mois de l’approbation des comptes par l'assemblée générale de l'association.
Pour que vos projets aboutissent dans les meilleures conditions, il est nécessaire de bien sélectionner la structure adaptée. Vous pouvez maintenant faire votre choix entre une société ou une association et vous lancer dans l'aventure !
Maître Alexis Aronio de Romblay
Avocat au barreau de Paris associé chez Lampidès & Potier.
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