
La rupture conventionnelle du salarié protégé : comment ça marche ?
Léna Cazenave
Diplômée d'un Master 2 en droit de la propriété intellectuelle de l'Université d'Aix-Marseille.
Le licenciement est une rupture du contrat de travail décidée par l’employeur. Elle est encadrée par des règles strictes, notamment celle de la cause réelle et sérieuse.
L’employeur ne peut licencier un salarié sans cause réelle et sérieuse et doit respecter une procédure de licenciement établie par le Code du travail.
Si le salarié pense qu’il est victime d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, il est en droit de saisir le Tribunal des Prud’hommes dans les 12 mois suivants son licenciement. Le juge étudiera alors l’ensemble des faits et des preuves. Toutefois, si un doute subsiste, il bénéficiera à la “ partie faible ”, c’est-à-dire au salarié.
Il n’est pas toujours facile de savoir ce qu’est un licenciement pour cause réelle et sérieuse, ou de savoir si vous êtes réellement victime d’un licenciement injustifié. Il est encore moins facile d’en déduire vos droits. C’est pourquoi nous vous proposons un guide complet sur le sujet.
Mini-Sommaire
Tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. La cause en elle-même n’est pas définie par la loi et peut varier selon les cas. Le juge apprécie donc les situations au cas par cas.
Ainsi, un licenciement sans cause réelle et sérieuse selon le Code du travail est un licenciement abusif. En effet, son motif n’est pas valable. Le motif du renvoi doit figurer dans la lettre de licenciement et correspondre à l’une des situations prévues par la loi. Ainsi, un motif de licenciement insuffisant ou renvoyant à une faute légère peut faire l’objet de contestation.
❓ Question fréquente : peut-on se faire licencier sans motif ? Non, sauf lors d’un licenciement économique. Ce genre de pratique n’est pour autant pas inexistante. Si vous en êtes victime, il est question d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Quels sont les motifs qui justifient un licenciement pour cause réelle et sérieuse ? Ils peuvent être :
Ils renvoient à un comportement incorrect du salarié qui perturbe le bon fonctionnement de l’entreprise et reposent sur des faits existants et objectifs. Par exemple :
Ces comportements peuvent être considérés comme des fautes justifiant un licenciement pour faute grave.
Ces faits doivent être réels et suffisamment graves. Par exemple, une simple mésentente entre collègues ne peut justifier le licenciement. Ainsi, ce motif est applicable dans le cas où le salarié manque à ses obligations professionnelles de manière régulière pour des raisons d’ordre privé. Par exemple :
❓ Question fréquente : Votre vie privée regarde-t-elle votre employeur ? Non, néanmoins, si votre vie privée entrave incontestablement vos obligations professionnelles, cela peut constituer un motif de licenciement. Vous ne pouvez pas vous faire renvoyer parce que vous êtes parent. En revanche, si le fait de vous occuper de vos enfants fait que vous manquez à vos obligations professionnelles de manière régulière, il est possible pour l’employeur de vous licencier.
Des motifs tels que la perte de confiance en soi ou une incompatibilité d’humeur peuvent paraître non fondés. Dans le deux cas, l’employeur doit apporter des faits corroborés et imputables au salarié en démontrant qu’ils entravent la bonne marche de l’entreprise. Dans le cas contraire, il peut s’agir d’un licenciement pour cause non réelle et sérieuse.
❓ Question fréquente : est-il possible de licencier un salarié pour insuffisance professionnelle ? Un salarié doit obligatoirement être formé s’il doit accomplir des missions pour lesquelles il ne dispose pas de toutes les compétences. Toutefois, des erreurs à répétition, la production d’un travail inutilisable ou de mauvaise qualité, voire un manque de résultat sont directement imputable au salarié. Dans ce cas, le salarié peut être renvoyé pour motif personnel.
Dans ce cas, le licenciement ne repose pas sur le salarié, mais sur des causes économiques telles que :
Un licenciement est nul lorsque le juge annule ce dernier, car il considère qu’il s’agit d’un licenciement injustifié. La nullité est prononcée dans les cas suivants :
Licenciement sans cause réelle et sérieuse et licenciement nul ne sont donc pas opposés. Au contraire, le licenciement nul est une forme de licenciement sans cause réelle et sérieuse, dont le motif est interdit par le Code du travail.
☝️ Bon à savoir : en cas de licenciement nul, il n’y a pas de barème légal pour les dommages-intérêts. L’indemnité prévue correspond à 6 mois de salaire brut minimum et n’est pas plafonnée.
❓ Question fréquente : qu’est-ce qu’un licenciement irrégulier ? Il s’agit d’un licenciement dont la cause est valable, mais dont la procédure n’a pas été respectée. Sa cause est donc réelle et sérieuse et ne peut donner lieu à une nullité. Cependant, elle peut permettre au salarié de bénéficier d’une compensation financière.
Voici les caractéristiques d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse :
⚠️ Attention : il faut noter que les critères réels et sérieux sont cumulatifs. Les deux doivent être réunis pour démontrer un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le licenciement sans cause réelle et sérieuse peut être contesté devant le conseil des prud’hommes. Sous 15 jours après réception de la lettre de licenciement, le salarié peut demander à son employeur des précisions sur les motifs de son licenciement.
La rupture du contrat de travail, quant à elle, peut être contestée dans un délai de 1 an. Les démarches consistent en la saisine du conseil des prud’hommes pour licenciement abusif. Une tentative de conciliation peut être engagée devant le bureau de conciliation. Si celle-ci échoue, alors les juges devront se prononcer sur le fait que le licenciement est injustifié ou non.
Si une décision pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est rendue par le Conseil des prud’hommes, le salarié peut retrouver son poste et récupérer les mois de salaires dus depuis le début de la procédure jusqu’à votre réintégration dans la société.
❓ Question fréquente : en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, quel préavis ? Le préavis n’est pas obligatoire dès lors que le motif du licenciement est une faute grave ou lourde.
L’indemnisation en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse est à la charge de l’employeur. Elle comprend :
Celle-ci se base sur le barème Macron, qui a été validé par la Cour de cassation et le Conseil constitutionnel. La somme perçue vise à réparer les dégâts causés par le licenciement abusif.
Le calcul d'indemnité de licenciement est établi en fonction de trois critères :
Voici les indemnités pour licenciement sans cause et sérieuse pour un salarié qui travaille dans une entreprise de moins de 11 employés.
Ancienneté en année |
Montant minimal en mois de salaire brut |
Moins de 1 an |
- |
1 an |
0,5 |
2 ans |
0,5 |
3 ans |
1 |
4 ans |
1 |
5 ans |
1,5 |
6 ans |
1,5 |
7 ans |
2 |
8 ans |
2 |
9 ans |
2,5 |
10 ans et plus |
2,5 |
Voici les indemnités prévues si le salarié travaille dans une entreprise de plus de 11 salariés. Leur montant est fixé par le juge dans le respect d’une somme plancher et d’une somme plafond. La somme plancher fixe le minimum d’argent que le salarié peut recevoir et la somme plafond le maximum.
Ancienneté en année |
Montant plancher (minimum) |
Montant plafond (maximum) |
Moins de 1 an |
- |
1 |
1 an |
1 |
2 |
2 ans |
3 |
3,5 |
3 ans |
3 |
4 |
4 ans |
3 |
5 |
5 ans |
3 |
6 |
6 ans |
3 |
7 |
7 ans |
3 |
8 |
8 ans |
3 |
8 |
9 ans |
3 |
9 |
10 ans |
3 |
10 |
11 ans |
3 |
10,5 |
12 ans |
3 |
11 |
13 ans |
3 |
11,5 |
14 ans |
3 |
12 |
15 ans |
3 |
13 |
16 ans |
3 |
13,5 |
17 ans |
3 |
14 |
18 ans |
3 |
14,5 |
19 ans |
3 |
15 mois |
20 ans |
3 |
15,5 |
21 ans |
3 |
16 |
22 ans |
3 |
16,5 |
23 ans |
3 |
17 |
24 ans |
3 |
17,5 |
25 ans |
3 |
18 |
26 ans |
3 |
18,5 |
27 ans |
3 |
19 |
28 ans |
3 |
19,5 |
29 ans |
3 |
20 |
30 ans et plus |
3 |
20 |
Voici quelques exemples concrets pour comprendre comment s’applique ce barème.
Exemple 1 : un salarié travaille pour une entreprise qui emploie 10 salariés depuis 5 ans. Ses derniers salaires s’élèvent à 2.300 € brut par mois. S’il est licencié sans cause réelle et sérieuse, le montant de son indemnité sera égal à 1,5 fois son salaire, soit 3.450 €.
Exemple 2 : un salarié travaille pour une entreprise de 150 salariés depuis 20 ans. Ses derniers salaires s’élèvent à 2.900 € brut par mois. S’il est licencié sans cause réelle et sérieuse, le montant de son indemnité pourra varier entre 8.700 € (2.900 x 3) et 46.400 € (2900 x 16).
💡 Astuce : n'hésitez pas à consulter notre fiche sur la rupture du contrat de travail pour avoir une idée des différentes options qui s'offrent aux salariés et aux employeurs pour mettre fin à un contrat de travail.
À l’issue du procès, le juge peut demander la réintégration du salarié dans l’entreprise. Celui-ci bénéficie de tous les avantages acquis avant son licenciement. Dans ce cas, il reprend l’exécution de son contrat de travail.
Le salarié est en droit de refuser cette réintégration. Alors, il perçoit des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. L’employeur, quant à lui, peut s’opposer à la réintégration du salarié uniquement si celle-ci est matériellement impossible.
☝️ Bon à savoir : un salarié qui a touché des indemnités de France Travail au titre de l’ARE (allocation chômage d’aide au retour à l’emploi) durant sa période d’inactivité n’a pas à les rembourser. Toutefois, un salarié protégé réintégré dans l’entreprise ne peut cumuler les allocations chômage et les indemnités perçues à ce titre. Pourtant, dans le cas d’un employeur d’une entreprise de plus 11 salariés avec un employé d’une ancienneté de plus de 2 ans, l’employeur est tenu au remboursement de ces indemnités.
Un licenciement est nul lorsqu’il est considéré comme illégal. Ainsi, plusieurs motifs sont mentionnés par la loi et permettent de prononcer la nullité du licenciement.
Ces motifs sont pour la plupart de nature discriminatoires ou portent atteinte à un droit fondamental du salarié. En outre, il peut s’agir également de motifs liés au harcèlement moral ou sexuel ou à la dénonciation de faits se déroulant dans l’entreprise. De même, le licenciement est nul s’il concerne un salarié protégé et que le procédure administrative n’a pas suivi les règles prévues dans ce cas.
Une rupture conventionnelle de contrat est décidée de manière conjointe entre un salarié et son employeur. Ils se mettent d’accord sur les modalités de départ du salarié en contrat à durée indéterminée (CDI). Elle ne peut être imposée par aucune des deux parties.
En revanche, un licenciement sans cause réelle et sérieuse est à l’initiative de l’employeur. C’est une décision unilatérale qui ne repose pas sur des motifs exigeant le renvoi du salarié de l’entreprise. Il s’agit donc d’un licenciement injustifié qui peut être contesté par l’employé.
Le licenciement pour cause réelle et sérieuse doit être prouvé par l’employeur. En effet, lors du licenciement, ce dernier doit mentionner un motif. Devant les juges, il doit prouver que le renvoi de l’employé est bien fondé sur une cause réelle et sérieuse. Dans le cas contraire, le salarié a gain de cause et le licenciement pour cause réelle et sérieuse est prouvé par l’inexistence ou l’insuffisance des faits qui lui sont reprochés.
Principales sources législatives et réglementaires
Note du document :
5,0 - 2 vote(s)
Léna Cazenave
Diplômée d'un Master 2 en droit de la propriété intellectuelle de l'Université d'Aix-Marseille.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplômé de Harvard.Fiche mise à jour le
Vous avez des questions ?
Téléchargez notre guide gratuit sur la création d'entreprise
Ces articles pourraient aussi vous intéresser :
La rupture conventionnelle du salarié protégé : comment ça marche ?
Zoom sur les avantages de la rupture conventionnelle
Rupture conventionnelle d'un contrat de travail
Rupture d'un CDD : le guide 2025
Rompre un contrat de travail
Rupture conventionnelle d’un CDD : définition, conséquences et alternatives
On a besoin de vous !
Si vous appréciez notre contenu, un avis sur Google nous aiderait énormément !