
Vers un statut de Travailleur Collaboratif ?
Malo de Braquilanges
DiplÎmé de Sciences Po et spécialisé dans l'accompagnement des créateurs d'entreprise chez Legalstart.fr.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplÎmé de Harvard.
Le 4 octobre 2016, lâIGAS (Inspection GĂ©nĂ©rale des Affaires Sociales) a rendu public un rapport important sur âles plateformes collaboratives, lâemploi et la protection socialeâ. Le but : analyser les enjeux sociaux (travail, emploi, formation, protection sociale) que posent le dĂ©veloppement rapide des plateformes collaboratives, dans leur diversitĂ© (Uber, Airbnb, Deliveroo, Blablacar, etc.).
MĂȘme si ces plateformes demeurent une « rĂ©alitĂ© Ă©conomique marginale », elles sont en forte croissance et reprĂ©sentent lâavenir. En 2015, leur volume dâaffaires est estimĂ© Ă 7 milliards dâeuros. Elles font donc partie dĂšs aujourdâhui du paysage du travail indĂ©pendant.
Le projet de loi de financement de la SĂ©curitĂ© Sociale pour 2017 (PLFSS 2017), adoptĂ© en 1Ăšre lecture le 2 novembre par lâAssemblĂ©e Nationale et en cours dâĂ©tude au SĂ©nat, se saisit Ă©galement de la question du travail collaboratif.
Le droit actuel ne permet pas de bien appréhender la nature du travail collaboratif, qui bouscule la frontiÚre entre salariat et non salariat. Il est parfois difficile de distinguer la nature professionnelle ou non du travail collaboratif. Dans quelle mesure faut-il fiscaliser le travail collaboratif ? Quelle protection sociale ? Le statut de micro-entrepreneur est-il adapté ?
Va-t-on vers la crĂ©ation dâun nouveau statut pour prendre en compte ces nouvelles formes de travail ?
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Le travailleur collaboratif : qui est-il ?
Le travailleur collaboratif concerne a priori toute personne vendant ou louant un bien, ou effectuant une prestation de service, via une plateforme collaborative.
Cependant, les travailleurs collaboratifs ne sont pas tous dans la mĂȘme situation ! Du particulier qui propose sa voiture sur Drivy quelques weekends par mois au chauffeur VTC sur Uber dont câest lâactivitĂ© principale, le travail collaboratif recouvre des circonstances trĂšs diverses.
CrĂ©ation dâun statut de micro-entrepreneur collaboratif ?
Le rapport de lâIGAS propose la crĂ©ation dâun statut nouveau de micro-entrepreneur collaboratif.
Ce statut reposerait sur un simple enregistrement auprĂšs du RSI grĂące au numĂ©ro de SĂ©curitĂ© Sociale. Le paiement des cotisations se ferait alors sur le modĂšle des micro-entrepreneurs, via le prĂ©lĂšvement libĂ©ratoire de lâIR. Le rapport ne sâavance pas plus et propose de rĂ©gler les cotisations soit de maniĂšre forfaitaire, soit en proportion des recettes.
On observe lĂ un statut hybride, qui nĂ©cessite un enregistrement, mais sans une complĂšte professionnalisation de lâactivitĂ© : le âmicro-entrepreneur collaboratifâ reste un particulier.
Il concernerait les travailleurs collaboratifs dont les revenus issus de leur activitĂ© sur les plateformes nâexcĂšdent pas 1 500 âŹ. Au-delĂ du seuil, le travailleur collaboratif devrait rejoindre un statut de droit commun dĂ©jĂ existant, comme le statut de micro-entrepreneur.
Le travailleur collaboratif dans la loi PLFSS 2017 : affiliation au RSI pour certains loueurs sur des plateformes telles quâAirbnb ou Drivy
Le texte prend le parti de ne pas créer de statut spécifique.
Seuil dâaffiliation au RSI pour payer des cotisations
Cependant, il contient une disposition importante (lâarticle 10) concernant les travailleurs collaboratifs des plateformes de location immobiliĂšre et de location de biens meubles. En clair, il vise les particuliers qui louent leur bien immobilier sur une plateforme telle quâAirbnb ou leur voiture sur une plateforme telle que Drivy.
En effet, un seuil dâaffiliation au RSI est créé pour les travailleurs des plateformes collaboratives. Au delĂ du seuil dĂ©fini, le particulier devra sâaffilier au RSI (RĂ©gime social des indĂ©pendants) et payer des cotisations sociales, car son activitĂ© sera considĂ©rĂ©e comme professionnel.
Dans la derniÚre version du texte en cours de discussion, le seuil est de 23 000 ⏠de recettes pour la location de biens immeubles (Airbnb), et de 7 720 ⏠pour la location de biens meubles (principalement des voitures, Drivy).
Possibilité de déléguer les démarches au RSI aux plateformes
A compter du 1er janvier 2018, les travailleurs collaboratifs pourront dĂ©lĂ©guer aux plateformes les dĂ©marches dâaffiliation, de dĂ©claration et de paiement des cotisations. Lâobjectif semble ĂȘtre de faire basculer la charge des dĂ©sagrĂ©ments liĂ©s au RSI vers les plateformes elles-mĂȘmes.
Et dâun point de vue fiscal ?
La loi PLFSS 2017 semble fixer un cadre social clair pour les travailleurs collaboratifs des plateformes de location. Concernant les impĂŽts, une instruction fiscale en date du 30 aout 2016 avait dĂ©jĂ prĂ©cisĂ© les modalitĂ©s dâimposition des revenus des plateformes pour des locations immobiliĂšres ou des locations de bien meubles :
- Revenus de particuliers tirĂ©s des activitĂ©s de co-consommation (type Blablacar) : exonĂ©rĂ© dâimpĂŽt sur le revenu
- Revenus tirĂ©s de la location dâun Ă©lĂ©ment de son patrimoine personnel (domicile ou voiture par exemple) : soumis Ă lâimpĂŽt sur le revenu (IR).
Ces diffĂ©rences dâapproche montrent que la rĂ©alitĂ© du travail collaboratif reste difficile Ă apprĂ©hender. Câest principalement lâutilisation des plateformes par des particuliers, comme Airbnb et Drivy, qui posent des problĂšmes en matiĂšre de protection sociale et de fiscalitĂ©. De nombreux travaux devront encore prĂ©ciser la notion de travailleur collaboratif et trancher sur la crĂ©ation future ou non dâun statut Ă part entiĂšre.
Malo de Braquilanges
DiplÎmé de Sciences Po et spécialisé dans l'accompagnement des créateurs d'entreprise chez Legalstart.fr.
Sous la direction de Pierre Aïdan, docteur en droit et diplÎmé de Harvard.Fiche mise à jour le
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